Écrit par Frederik Gadeyne, chercheur spécialisé dans les ruminants
Imaginez une vache avec son veau à ses côtés, broutant joyeusement dans une prairie printanière. Cette image idyllique est rendue possible grâce aux microbes. Comme tous les animaux, les ruminants dépendent fortement de la synergie entre eux-mêmes et les microbes qui les entourent. Cette interaction entre les animaux et leurs hôtes microbiens est d’une importance capitale pour la santé et la productivité des animaux. Les bactéries, champignons et protozoaires présents dans le rumen permettent aux vaches de digérer des composants alimentaires qui seraient autrement sous-utilisés, en particulier les composants riches en fibres tels que l’herbe et le foin. De fait, l’impact des microbes sur la productivité et la santé n’est pas différent pour les veaux, bien et ceux bien avant qu’ils ne commencent à ruminer.
Le microbiome d’un veau en plein développement
Le microbiome gastro-intestinal se développe rapidement après la naissance. Les microbes peuvent pénétrer de plusieurs façons dans le rumen et les intestins en développement du veau. Cela inclut le transfert de microbes provenant du microbiote vaginal ou fécal de la mère, l’inoculation à partir de l’environnement de l’étable dans laquelle le veau est né et la dérivation du microbiome présent dans le colostrum de la vache (figure 1). Au cours de la dernière décennie, les connaissances scientifiques se sont rapidement développées, parallèlement au développement d’outils de séquençage permettant d’analyser les microbes. Nos connaissances sur les microbes chez les ruminants s’enrichissent de jour en jour, mais une chose est déjà claire : la colonisation de l’intestin du veau est un processus qui prend du temps et dépend de multiples facteurs tels que la consommation de lait et d’aliments solides, la composition alimentaire, l’utilisation d’antibiotiques, l’âge et la pression environnementale. La composition microbienne de l’intestin est en plein développement, en particulier pendant les premiers jours de vie, et ce processus se poursuit jusqu’au sevrage.

Les microbes de l’intestin changent au fil du temps
Une grande variété de microbes – notamment des champignons, des virus, des protozoaires et, surtout, des bactéries – résident dans l’intestin des ruminants. Les espèces bactériennes peuvent être classées en différentes familles, ordres, classes et phylums. Les phylums les plus dominants présents dans le rumen et les intestins des veaux nouveau-nés en développement sont les Firmicutes, les Bacteroidetes Proteobacteria et les Actinobacteria. L’abondance relative des bactéries au sein de ces groupes évolue constamment de la naissance au sevrage, y compris pour des genres bactériens bien connus tels que Lactobacillus (qui fait partie des Firmicutes) et Prevotella (qui appartient aux Bacteroidetes) (Figure 2). La plupart des bactéries présentes dans l’intestin sont bénéfiques, mais certaines sont pathogènes, comme Escherichia coli ou Salmonella typhimurium, les membres les plus connus du phylum des Proteobacteria.

Un microbiome plus diversifié renforce la résilience contre les agents pathogènes
Au tout début de la vie d’un veau, la composition bactérienne n’est pas stable : c’est un processus qui se poursuit jusqu’au sevrage. Les bactéries colonisatrices vont et viennent, mais avec l’âge, la communauté bactérienne devient de plus en plus diversifiée, en particulier pendant la période précédant le sevrage (figure 3). Il est bien connu qu’un microbiome plus diversifié renforce la résistance aux agents pathogènes. La présence de nombreux types de micro-organismes empêche les agents pathogènes de se développer au-delà de seuils nocifs. Un microbiome plus riche permet aux animaux en croissance de faire face à des situations plus néfastes et à davantage d’agents pathogènes, réduisant ainsi le risque de troubles intestinaux. Tant que le microbiome du veau n’est pas complètement établi, les veaux sont (beaucoup plus que les vaches adultes) sujets à la colonisation par des agents pathogènes intestinaux et, par conséquent, à des maladies gastro-intestinales. Le rapport entre les deux plus abondant phyla, les Firmicutes et les Bacteroidetes, est largement accepté comme un marqueur de la dysbiose du microbiote gastro-intestinal. Les changements dans le rapport Firmicutes/Bacteroidetes peuvent être liés à diverses maladies telles que la diarrhée néonatale des veaux.

Défis chez les jeunes veaux
La diarrhée du veau, communément appelée « scours » en anglais, reste le problème n° 1 dans l’élevage des veaux. De nombreux agents pathogènes peuvent en être responsables, notamment les rotavirus ou les coronavirus, les parasites Cryptosporidium parvum et des bactéries telles que E. coli ou Salmonella. La prévalence de ces agents pathogènes est la plus élevée au cours des premières semaines de vie, ce qui n’est pas un hasard puisque c’est à ce moment-là que le microbiome intestinal du veau n’est pas encore établi. La diarrhée néonatale des veaux a un impact important sur le développement intestinal des jeunes animaux, tant au niveau de la muqueuse épithéliale que de la composition microbienne. Cela a donc un effet négatif sur leur croissance. De plus, des problèmes respiratoires surviennent souvent lorsque les veaux sont soumis à des situations stressantes. Ainsi, les interventions visant à prévenir la diarrhée et les problèmes respiratoires réduisent le besoin de traitements antibiotiques, ce qui aide les éleveurs à réduire leurs coûts d’alimentation et vétérinaires, et donc à générer des revenus plus durables, sans parler de la diminution de la résistance aux antibiotiques dans le secteur animal.
Libérer tout le potentiel microbien
Il est nécessaire de soutenir les veaux pendant ces premières semaines cruciales pour que la période d’élevage soit couronnée de succès. Outre de bonnes pratiques de gestion, les vaccinations et l’administration de quantités suffisantes de colostrum, un éleveur ne dispose pas de nombreux outils nutritionnels pour favoriser un développement rapide et adéquat du microbiome du veau. La consommation d’aliments solides est limitée au cours des premières semaines de vie, lorsque les veaux dépendent encore fortement de la consommation de lait. Par conséquent, l’adaptation de la composition du lait de remplacement pour veaux (CMR) est le moyen le plus rapide, le plus simple et le plus efficace pour les éleveurs de favoriser le développement du microbiome du veau et la santé qui y est associée dès le début de sa vie. Il est bien connu que les premiers jours de vie sont essentiels pour favoriser la santé intestinale des jeunes veaux. Il a récemment été démontré que la deuxième semaine de vie est un moment clef pour une intervention nutritionelle précoce, lorsque l’abondance des bactéries digestives du lait (telles que Lactobacillus) augmente et que l’abondance des bactéries pathogènes (par exemple, Proteobacteria et Shigella) diminue. Le fait d’avoir un microbiome stable et pleinement établi dès que possible permet aux veaux de grandir de la manière la plus efficace et la plus saine possible.
Les AGCM durables favorisent la santé intestinale
Les experts d’Agrimprove travaillent chaque jour à l’élaboration de solutions durables qui aident les agriculteurs à limiter autant que possible les maladies des veaux. Les acides gras à chaîne moyenne (AGCM) constituent une option nutritionnelle, mais ils ne proviennent souvent pas de sources durables, car ils sont dérivés de l’huile de palme ou de noix de coco. C’est pourquoi les chercheurs d’Agrimprove ont mis au point Aromabiotic® Calf, un complément CMR favorisant la santé, à base d’AGCM durables provenant de flux de déchets. Une vaste expérience a été mise en place pour évaluer l’effet d’Aromabiotic® Calf sur la croissance et la santé intestinale et pulmonaire des veaux laitiers à la ferme de recherche Blanca, dans les Pyrénées espagnoles. Les AGCM durables ont eu une influence positive sur la santé intestinale et pulmonaire lorsqu’ils ont été administrés dans le cadre du CMR, et ils ont eu un effet positif sur le maintien de l’homéostasie intestinale, en particulier lorsque le microbiome du veau était en plein développement. Deux résumés sur ces nouvelles preuves scientifiques ont été présentés lors de la 76e réunion annuelle de l’EAAP (Association européenne pour la production animale) à Innsbruck, en Autriche.
Les références sont disponibles sur demande.